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Il y a des artistes à côté desquels on peut passer. Par flemme, par manque de curiosité dans une offre musicale pléthorique. J’étais complètement passé à côté des albums de la française The Rodeo. Mais The Rodeo a changé, et je suis tombé amoureux de sa musique. Finies les atmosphères folk et les virées country à Tucson, place au raffinement british dans la langue de France Gall. The Rodeo est devenue la belle de Sebastian en rentrant au bercail. “Hello Lio, goodbye Dolly” pourrait-on dire à l’écoute de l’album “Thérianthropie Paradis”, mais ce serait déjà réducteur, tant l’album est riche de matière sonore et de vocabulaire imagé, bien au dessus de la mêlée pop actuelle. On peut faire des chansons fantastiques (au sens surnaturel) qui vont droit au coeur, se prendre pour la reine des neiges option Delphine Seyrig, imaginer des mélodies purement addictives (Calypso) et faire revivre une certaine idée de la chanson française, en ne gardant que l’essentiel : des textes au cordeau, des belles mélodies, et du style. C’est encore un secret, mais “Thérianthropie Paradis” est l’un des meilleurs albums de l’année. En tout cas pour Faces.  

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ENTRETIEN & PHOTOS:  Nicolas Vidal
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“Thérianthropie Paradis” est ton 3ème album. Tu as également sorti 4 EP. Mais la grosse différence est que celui-ci est entièrement chanté en français contrairement aux autres.
J’ai commencé à sortir des chansons il y a 8 ans. Sur deux de mes précédents EP, il y avait à chaque fois une chanson en français, donc je tendais à y venir. Mais, toutes mes influences ont toujours été anglo-saxonnes et c’est pour ça que je n’avais pas envie d’aller complètement vers le français. Et puis on m’a suggéré d’essayer un peu plus, et j’ai trouvé que certains artistes le faisaient très bien depuis quelques années, surtout en le faisant sonner sur des mélodies pop. Donc je me suis lancée.

Sur cet album, tu as réussi à capter un certain “air du temps” sans aller vers la pop-électro que l’on entend beaucoup. Il y a quelque chose de très classique aussi, notamment dans le vocabulaire que tu utilises dans les textes, le bestiaire, une sorte de fantastique fantasque…
J’aime utiliser des mots “désuets”, bien que je n’aime pas ce mot car on n’y entend que le côté léger. J’aime que cela sonne un peu ancien, classe. J’aime utiliser des mots qu’on entend peu, jouer avec les allitérations. C’est ce qui est beau dans la langue française. Comme “Candélabre” que l’on entend rarement dans une chanson. Ou “Cryogénie”. Je suis allée vers des thèmes qui sont quand même dans l’air du temps, comme la science, la médecine, les réseaux sociaux, mais sans utiliser le vocabulaire associé, des mots comme “SMS”...“Que ma mémoire vive” m’a été inspiré par un article que j’avais lu sur des chercheurs qui ont inventé une pilule pour enlever de la mémoire les souvenirs traumatiques. Et ça me fascine. “L’orage” parle du trop plein d’informations, de la recherche du sensationnel que je trouve étouffant.

 

"Je me suis glissée dans la peau d’un personnage qui est moi sans être moi. C’est ce que j’aime en musique. Il y a peu d’éléments biographiques dans mes chansons. "

Tout ce que tu écris est assez poétique, très français. Est-ce que tu avais le même sens du détail quand tu écrivais en anglais?
Je pense ne pas être allée aussi loin dans ce que je voulais dire. Pour moi, c’était plus mélangé, le texte, la musique. En français je suis plus tatillonne, je fais attention à chaque virgule. En anglais je pouvais m’amuser à écrire un texte très noir sur une mélodie joyeuse, ce qui passe moins bien en français. C’est beaucoup plus chiadé en français.

Pour la musique, on pourrait dire que tu es passée de Dolly Parton à France Gall. Surtout car ta voix rappelle la sienne dans les années 60. Musicalement, on pense aussi à Belle & Sebastian, The Divine Comedy…
Je passe d’une blonde à l’autre (sourire). C’était très inconscient ces influences là, bien que les arrangements de cordes et de claviers aient été faits par Mathieu Geghre qui est un grand fan de Divine Comedy. France Gall a été une grande influence pour le disque, mais également des chanteuses européennes comme Jeanette ou Mina. Cette façon de chanter tellement douce. J’adore les shows télé de cette époque ou elles ont une belle robe, avec tout un orchestre derrière elle. J’aime le grandiose des arrangements des années 70, les voix hyper chiadées, et les textes qui ne sont pas anecdotiques. J’essaie de faire des chansons qui j’espère dureront dans le temps. J’aime l’idée que les chansons traversent les âges. En y amenant une touche moderne bien entendu.

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"J’ai la quête de la mélodie parfaite. Pas au sens du tube qui ne te lâche pas, mais je suis fascinée par cette recherche."

 

Quand on entend le premier titre de ton album, on s’attend à des chansons plus électro-pop, légères, et finalement, il y a peu de synthés dans le disque, on part vraiment ailleurs en terme de son. Et puis il y a cette progression qui va de la légèreté à la noirceur pour terminer dans le conte.
Il y a peu de gens qui écoutent les albums du début à la fin aujourd’hui. J’ai imaginé le tracklisting en clair-obscur. Effectivement on part de “Ivre d’amour”, quelque chose de joyeux à “Thérianthropie Paradis” qui a une atmosphère de tanière, plus sombre. Et puis c’est le titre de l’album. C’est comme une transformation. J’ai choisi ce titre pour parler de ma transformation musicale, dans le style, et aussi dans l’utilisation de ma voix qui est plus aigüe, sur un filet de voix. Je suis restée sur la tonalité d’origine de la composition qui est plus haute que ma tessiture habituelle. Je me suis glissée dans la peau d’un personnage qui est moi sans être moi. C’est ce que j’aime en musique. Il y a peu d’éléments biographiques dans mes chansons.

On sent l’imaginaire féérique dans tes chansons, les princesses... Un petit côté Jacques Demy, parfois même dans les arrangements. Ce côté “Reine des neiges” version indé comme dans “Cryogénie”.
Ah oui c’est pas mal ça (rires). J’ai baigné dans les comédies musicales depuis mon enfance. Mon oncle, qui m’a fait découvrir la musique assez tôt, est un grand fan de Michel Legrand. J’ai été très inspirée par la musique du film “Le départ” de Jerzy Skolimowski. J’aime cette fantaisie, ces personnages fantasques ou l’enfance n’est pas loin. Je suis très cinéphile et j’imagine tout de suite des images sur mes chansons. Comme sur la pochette du disque, réalisée par Charlotte Giamarchi et Elodie Daguin, où l’on s’est inspirées du film “Les lèvres rouges” avec Delphine Seyrig que j’adore. On est entre le roman-photo et le film de vampire, le giallo italien.

Comment es-tu venue à la musique?
Je pense que depuis toujours, je voulais faire quelque chose d’artistique. Je faisais beaucoup de spectacles chez moi. J’étais timide mais j’adorais amuser la galerie. Et puis à 15 ans, mon oncle m’a offert une guitare et ça a été la révélation. J’ai appris seule à en jouer. Je chantais et j’écrivais déjà un peu avant. Et puis la vie d’ado m’a fait rencontrer des gens avec qui j’ai monté un groupe, ou je jouais de la basse. Et puis je me suis mise à composer les premières chansons du groupe. Au début quand tu es chanteur, tu fonctionnes par mimétisme. Ça m’a pris du temps de trouver ma voix.

Je trouve qu’il y a quand même quelques passerelles entre tes différents albums, notamment dans le côté sixties de ton travail.
J’ai la quête de la mélodie parfaite. Pas au sens du tube qui ne te lâche pas, mais je suis fascinée par cette recherche. De la composition globale. Je suis fascinée par le changement de tonalité au sein d’un morceau par exemple. Pour le côté sixties, j’aime cette fraîcheur, ce côté enfantin, un peu intemporel. Un peu comme chez Blonde Redhead. La voix de Kazu amène ça. Pour le dernier album, je suis plus partie là-dessus que sur le côté “Femme fatale” que j’ai pu avoir auparavant.

"Je me suis glissée dans la peau d’un personnage qui est moi sans être moi. Il y a peu d’éléments biographiques dans mes chansons."

 

Tu as beaucoup joué à l’étranger avec tes albums précédents. Est-ce que le fait d’être passée au français avec ce nouveau projet va te permettre de continuer à t'exporter ?
Aujourd’hui ça passe. Il n’y a plus tellement de barrières. La mélodie indique quand même les choses. Et puis la chanson française est dans de beaux jours actuellement. Gainsbourg, Françoise Hardy, France Gall ou plus récemment Yelle ou Chris marchent à l’étranger et c’est tant mieux.

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Nick Cave “ C’est l’artiste dont j’ai le plus de disques à la maison. J’aime le musicien mais aussi l’auteur, le réalisateur, le scénariste. Et puis ce côté chamanique sur scène. Il est d’une grande classe malgré toutes les épreuves et les époques qu’il a traversé. C’est un mec qui me touche. Il a commencé en punk poète junkie et il est toujours là. Sa voix me transperce. Et puis j'aime qu'il soit relié au cinéma car je suis aussi très cinéphile, et ça me plait.”

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PEINTURE/PHOTO- “ J’aime Saul Leiter. Il capture ce qu’on ne voit pas, dans des reflets, des rétroviseurs, les rues de New York, très mélancoliques. Et puis Raymond Depardon et son âme humaniste. Sa grande sensibilité, sa discrétion malgré le fait qu’il ait parcouru le monde et qu’il soit très considéré. Ses photos ont une force bluffante. Et même ce qu’il fait aujourd’hui avec le Bal et ses documentaires sont incroyables.”

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CINEMA- “ “Macadam Cowboy” de John Schlesinger, c’est l’Amérique avec mon regard d’ado. Ce duo improbable, m’a donné envie de traverser les Etats-Unis, ce que j’ai fait plus tard. Comme “Paris-Texas” de Wim Wenders. Ces personnages d’une extrême sensibilité, la musique de Ry Cooder, la beauté de Nastassja Kinski, c’est l’Amérique, avec ses portraits de personnages brisés. Plus récemment, c’est “Under the skin” de Jonathan Glazer qui m’a énormément marqué. Ce film est un ovni. C’est une expérience proche de l’art contemporain avec une Scarlett Johansson comme on ne l’a jamais vue. Le travail sur la lumière qui rappelle “L’enfer” de Clouzot. J’ai trouvé ça dingue, moderne. J’aime beaucoup “Memories of murder” de Bong Jong Ho. Je suis fan du cinéma asiatique. Mais je n’ai découvert ce film qu’il y a 6 mois, et ça a été un choc. J’aime les personnages fous, les fantômes, la bouffe qui est toujours présente dans les films asiatiques. Et puis “My own private Idaho”, c’est mon côté Portland, Seattle. C’était mon époque grunge adolescente, avec ces deux beaux mecs.”

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Disques- “ Je n’ai jamais été très fan de groupes. Je suis admirative ou fascinée par certains disques. Le groupe que j’ai le plus suivi, c’est  Deus, notamment l’album ”In a bar, under the sea”. J’aimais beaucoup la scène belge des années 90, et je trouvais que c’était un groupe incroyable qui mélangeait beaucoup de choses. Les mélodies, la voix de Tom Barman, les influences jazz. C’est un groupe que j’ai suivi sur plusieurs dates, chose que je ne fais jamais. L’album de Dinosaur Junior, “Green Mind” a la pochette la plus belle des années 90. Elle m’a hantée pendant longtemps. C’est l’un des premiers groupes qui m’ai fait dire que l’on n’est pas obligé d’être excellent pour faire de la musique, mais on peut faire un truc fou, brut, dans l’urgence. Il m’a beaucoup décomplexée. Blonde Redhead avec “Melody of Certain Damaged Lemons” très influencé par Gainsbourg, m’a beaucoup fasciné. Ça m’a tellement plu que j’ai  enregistré dans le studio où ils ont enregistré, avec le même producteur. Il y a la voix de Kazu, très haut perchée. C’est un album sous tension, assez minimaliste que j’adore. J’aime aussi Margot Gurian et l’album “Take a Picture”. C’est une grande pianiste qui s’est retrouvée à faire un album pop très simple aux mélodies imparables. Elle a fait uniquement 2 albums. Et pour finir, Karen Dalton, grosse influence pour moi. Cette voix d’un autre temps, habitée par plein de démons.”

Ma playlist

Ma Playlist...

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LIVRES - “”L’Homme Dé” de Luke Rhinehart est sorti pendant la guerre du Vietnam. Il a été interdit aux USA pendant des années. C’est l’histoire d’un homme qui joue sa vie aux dés. C’est un livre qui peut changer la vie, qu’on m’a offert à 20 ans. Je ferais le parallèle avec le jeu de cartes “Oblique Stratégie” de Brian Eno, qu’il a sorti à la suite de l’enregistrement à Berlin avec Bowie qui était dans une impasse. Ce sont des contraintes très stimulantes. Quand on est un peu perdu dans sa vie artistique, ça peut aider. Et ce livre assez fou a été un grand choc. J’aime beaucoup Emmanuel Carrère, son style, son écriture. J’ai choisi “Limonov” car je suis une grande fan des biographies. Je suis fascinée par les parcours de vie. Comme “Just Kids” de Patti Smith ou “La disparition de Joseph Mengele” de Olivier Guez qui dépasse toute fiction."

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© Julia Romanovskaya

“ J’aime beaucoup le travail de Laure Briard. On se connait peu, mais j’ai l’impression qu’on se ressemble. Elle a une manière très personnelle de faire les choses, une manière de chanter qui lui appartient, un peu comme Cléa Vincent. Sa musique est très orchestrée avec un vocabulaire bien à elle. Et en plus c’est une belle personne. Elle a un super groupe sur scène, et je trouve ses chansons très réussies.”

Un portrait chinois de The Rodeo à travers ses idoles teenage et celles d’aujourd’hui.

Ton idole teenage
Michael Jackson

Ta  chanteuse Teenage
Madonna

Ton chanteur teenage
Kurt Cobain, Jon Spencer

Ton acteur teenage
River Phoenix

Ton actrice teenage
Winona Ryder

 


Ton crush teenage
Johnny Depp

Ton idole actuelle
Edouard Baer


Ta chanteuse actuelle
Debbie Harry

Ton chanteur actuel
The Lemon Twigs

Ton acteur Actuel
Marcello Mastroianni

Ton actrice Actuelle
Laetitia Dosh, GenaRowlands

Ton crush actuel
Tom Hardy

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