Pop Girls Made In France !
Depuis les années 60 et l’avènement des yéyés, la France a toujours été une patrie favorable aux pop girls. Des one hit wonder des sixties et eighties aux carrières très honorables des grandes dames pop, la musique populaire française a su inventer des personnalités de grand talent que les fans de musique et de mélodies sucrées ont toujours su honorer de ce côté-ci du monde. De Françoise Hardy à Lio, de France Gall à Alma Forrer, panorama en 10 visages de la richesse pop made in French Girls.
France Gall
France Gall serait-elle - à son insu - la matrice de la fille french pop par excellence ? Égérie sixties à mi-chemin entre le jazz easy listening et la pop yéyé, elle aura finalement travaillé avec les meilleurs orfèvres de l'époque (Serge Gainsbourg, Joe Dassin, André Popp, entre autre) jusqu'à sa rencontre avec celui qui restera son pygmalion forever, Michel Berger, qui lui écrira un répertoire sur mesure. Des intonations autoritaires, une sensibilité variété, une justesse d’interprétation, France Gall peut se targuer d'avoir fait danser les foules tout en les sensibilisant aux problèmes du continent Africain. Chanteuse Mittérandienne, passionaria pop, elle aura ému la France entière par son parcours de mère sacrificielle résistant aux sirènes du show biz en prenant une retraite précoce, et regrettable pour nous. Elle disait qu’elle ne ferait jamais mieux que les chansons de Michel Berger. Elle avait fait aussi bien - mieux ?- dès ses débuts. Son absolue justesse vocale et son timbre sucré continuent d'influencer nombre de chanteuses, The Rodeo en tête.
Lio
Si France Gall est la matrice de la chanteuses pop moderne, Lio en est la version la plus aboutie depuis l’inaugural “Banana Split” en 79. Incarnation punk et sexy à ses débuts lolitesque, Lio a vite su choisir et imposer des collaborations et des associations pop - Daho, Jacno, les Sparks, Alain Chamfort, John Cale, Jacques Duval, Jay Alanski - qui l’ont consacrée reine des pommes et de la pop sans aucune concurrente sérieuse dans ce domaine. Au milieu des années 80 et de la “Pop Model” mania, elle est la seule à pervertir de l’intérieur par son attitude féministe et espiègle, un top 50 parfois ringard. Elle a, jusqu’au milieu des années 90, enregistré des albums souvent audacieux, parfois ratés, mais toujours pop. Icône populaire toujours un peu à la marge, elle reste finalement plutôt punk dans son refus des compromis. La nouvelle vague pop féminine l’a érigée en Madonne (comme l’avaient imaginée Pierre & Gilles), et ce n’est que justice.
Laure Briard
Laure Briard est une égérie pop d'aujourd'hui. Les pieds sur terre et la tête ailleurs, elle enfile les chansons comme d'autres les belles robes, et se les approprie à la manière d'une Jeanne Moreau indé. Ses albums dessinent un parcours où le voyage et la découverte se marient harmonieusement à la pop d'ici, qu’elle chante en anglais, en français ou en portugais. Ce n'est pas étonnant que ses chansons plaisent à l'étranger, tant le mélange musical qui façonne ses disques paraît sincère et évident, là ou d'autres, par opportunisme où par mode, vont où le marketing les mènent. Laure Briard est terrienne et paraît s'amuser en faisant de la musique. Elle est pop car elle est psyché, elle est bosa, elle est chanson. Il suffit d’écouter ses titres pour tomber amoureux de son grain un peu fou, “Sur la piste de danse” où sous un “Kooky sun”. Son nouvel album, « Ne pas trop rester bleue », sous influences Carole King/Barbra Streisand est encore une pure réussite et sort le 10 février.
Pascale Borel
Pascale Borel, chanteuse au timbre doux et au ton légèrement décalé apparue dans la première parties des eighties, fait partie - à l’instar de Lio et d’Elli Medeiros - du cercle très fermé de nos égéries pop. A priori plus discrète, c’est d’abord par la grâce conjuguée des images de Pierre & Gilles et des synthétiques ritournelles de Mikado que nous l’avons connue, en “collier de varech” vantant les mérites de “la petite boite à sardine”. Longtemps associée à l’imagerie glamour kitsch de Pierre et Gilles, Pascale a su rebondir à la fin de Mikado, enregistrant de ci de là des pépites pop avec Etienne Charry où avec le groupe Bien, jusqu’à sa rencontre avec Jérémie Lefebvre. Elle n’a cessé depuis de nous enchanter dans ses 3 albums solos, qu’elle nous livre avec délicatesse et parcimonie. Des chansons pop comme des bonbons au poivre, faussement naïves mais réellement bien troussées, délicieusement addictives au milieu du torrent urbain de la chanson actuelle. Pascale Borel, fille pop du soleil forever. Vivement de nouvelles chansons.
Alizée
Mylène Farmer et « Moi Lolita » ont fait d’Alizée la teenage singer du début des années 2000 et un guilty pleasure réussi. Autant dire qu’on n’attendait pas grand chose de la suite de sa carrière. Mais voilà, la chanteuse a concocté ses deux albums suivants avec un flair plutôt sympathique, conviant la fine fleur des auteurs/compositeurs d’ici (Daniel Darc, Frédéric Lo, Bertrand Burgalat, Jean Fauque) pour son album « Psychédélices » sorti en 2007, puis en produisant le suivant, « Une enfant du siècle », avec Chateau Marmont, Rob et Tahity Boy. Le disque, très réussi et ultra référencé (Warhol, Edie Sedgwick, l’Italo Disco eighties), fait le pont entre une électro pointue et le meilleur de Jeanne Mas. La voix blanche légèrement atone de la chanteuse se fond merveilleusement sur des productions électro eighties classieuses. L’album est un flop commercial qui n’a pas réussi à séduire ni les branchés, ni les fans de la première heure. La chanteuse a depuis abandonné ses velléités de devenir une chanteuse pop essentielle pour repartir vers les rives plus sécurisantes de « Danse avec les stars ». Dommage.
Alma Forrer
Alma Forrer une équilibriste pop. Entre folk éthérée ultra touchante et refrains “Adjaniesque”, ses chansons nous transpercent le coeur à chaque écoute. Ce mélange de fantaisie et de douceur, cette personnalité résolument poétique et attachante, cette façon de voir le monde à travers des chansons presque d'une autre époque en font une chanteuse aussi anachronique que rare. La modernité de son timbre et son penchant romantique, capable de reprendre Patrick Juvet et de vanter les mérites de Townes Van Zandt, auraient du logiquement alerter tous les radars des fans de pop et de songwriters sensibles. On espère que les successeurs de son inaugural album ‘L’année du loup » seront nombreux et toujours aussi sensibles.
Cléa Vincent
Cléa Vincent est une fée pop. Cheffe de file de la scène indé, son bel enthousiasme et son énergie fédératrice font d’elle une pièce maîtresse de la néo pop française. Depuis plusieurs années qu’elle évolue dans ce milieu, elle est celle dont on ressent le plus l’attachement à la scène, au public, désarmante de sincérité, passant d’un projet de reprises (Garçons) à un groupe de jazz (A la mode) avec le même enthousiasme. Par la grâce de ses chansons aux mélodies imparables - des tubes indés qui en d’autres temps ne le seraient pas restés - elle fait la synthèse entre un songwriting sophistiqué et une légèreté mélancolique. Son habileté à trousser des refrains pop intemporels, entre comptines girl power et accords neo French touch en font une figure essentielle de la musique en France. On attend un nouvel album pour bientôt ainsi que le résultat de sa collaboration avec la comédienne Jeanne Balibar qui éveille notre curiosité !
Françoise Hardy
Astre noir et princesse pop, le rose et le gris jouent des coudes dans la carrière parfaite de Françoise Hardy. Yéyé girl au ton mélancolique, elle n’a eu de cesse durant toute sa carrière de promouvoir la mélodie pop parfaite pour conter les amours perturbées, surannées ou capricieuses. Égérie et créatrice, elle est l’une des rares fille des sixties à avoir su gérer chaque décennie suivante avec un discernement pop plus que respectable. De “La question” à “V.I.P”, de “Partir quand même” au parfait album “Le danger”, il est rare de trouver une telle cohérence musicale sur une carrière aussi riche. Toujours à la recherche de la mélodie parfaite, elle a depuis quelques années fait appel à des composteurs et des compositrices trés différents (De Pascale Daniel à Calogero), faisant fi des chapelles entre variété et pop pour se mettre au service de quelque chose de plus grand : la qualité musicale.
Mathilde Fernandez
La France pop n’a pas toujours eu de performers musicaux qui embrassent l’image autant que la musique. En ce sens, Mathilde Fernandez est étonnante. Du genre à avoir des fans transis d’amour (Christophe en était un) qui se damnent pour ses chansons et ses performances. La faute à une image un peu noire, gothique mais non dénuée d’humour. On les comprend car elle nous fascine depuis que l’on a découvert sa chanson “Égérie”, une ode fantasmée à une Cicciolina (icône trash eighties passée du porno à la politique italienne) plus vraie que nature. Un morceau pop qui croise Nina Hagen et Niagara, la pop et l’Opéra. Elle a depuis sorti plusieurs titres et créé un duo, Ascendant Vierge, qui lorgne du côté trans de la pop, comme si Mylène Farmer devenait adepte des raves sauvages. Mathilde Fernandez ne partage pas seulement les initiales de notre rousse préférée, mais aussi son sens de la provocation et des chansons à écouter autant qu’à regarder.
Elli Medeiros
Il y a dans la trajectoire pop d’Elli Medeiros quelque chose de l’ordre du renoncement. Mais aussi du hasard. Hasard du succès énorme et fantasque des années 80 du à un “Toi mon toit” iconique et latin après un parcours punk et pop en duo avec Jacno. Comme si après ce succès énorme, elle n’avait pas eu envie d’aller plus loin, sortant rarement de sa réserve pop, retournant dans les eaux punk anonymes du militantisme. Pourtant, Elli Medeiros reste cette icône vénérée par Etienne Daho, la complice synthétique de Jacno, la muse underground ultime avec qui tous les pop boys de Paris et d’ailleurs voudraient se promener “Main dans la main”. Il y a finalement peu d’artistes français devenus cultes grâce à des courants musicaux différents. Elli Medeiros l’est devenue parce qu’elle a démarré dans le punk, a inventé la synthpop française, fait danser la France sur une pop métissée, et se paie même le luxe d’avoir un chef d’oeuvre méconnu sous le coude (la chanson “Soulève-moi” est à redécouvrir d’urgence).
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