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Thibaut Pez est un "Garçon Formidable"


Mes amis Facebook ont bon goût. Sans cet ami virtuel qui a décidé de poster le clip de Thibaut Pez, “Que tu meures” le jour même de sa sortie, je n’aurais peut être pas eu vent de ce tube en puissance qui m’a accompagné tout l’été et qui m’a donné envie dans la foulée de découvrir son EP “Garçon formidable”, 4 titres pop où la grâce mélodique se conjugue à une attitude queer et des textes percutants. “Il y a de moins en moins de garçons qui font de la pop. Et c’est important pour moi de mettre un shoot de romantisme dans une époque un peu grise et cynique. Je ne sais pas si je suis fleur bleue, même si j’ai un titre qui s’appelle comme ça, mais ça se rapproche du romantisme noir.”


De romantisme, il est évidemment question dans cet EP, dès l’écoute du fameux “Que tu meures”, où de bien inavouables sentiments s’expriment fortement. “ Il faut vraiment dire ce que l’on pense et être sincère. La chanson “Que tu meures” est une chanson que j’ai écrite très tôt, et j’avais peur du côté un peu inavouable. Mais beaucoup de personnes autour de moi se sont retrouvées dans ce thème, ce qui m’a conforté.” Il faut dire que la mélodie, très accrocheuse, se pare d’atours électroniques que ne renieraient pas Robyn, tout en affirmant de manière poétique le ressentiment amoureux, plutôt proche d’un Alex Beaupain. “”les chansons d’amour” de Beaupain a été très important pour moi, et je trouve que c'est une des plus belles plumes française. Après, j’ai vraiment l’ambition de faire de la pop, voire une pop dance et de m’éloigner de la chanson française. En tout cas dans mes arrangements.”

Cet EP, enregistré avec Jérémy Rassat et mixé par Etienne Caylou, a le mérite de mettre en avant un romantisme queer et pop peu représenté par les garçons en France - et en français - alors que les Troye Sivan où King Princess inondent les magazines branchés anglo-saxons avec leur pop où désirs queer riment avec branchitude : “Je veux être complètement honnête dans mes chansons, donc je parlerai toujours de manière genré, avec des pronoms masculins. Je ne veux pas avoir recours à des subterfuges. Il y a des artistes qui le font très bien, qui veulent que tout le monde puisse se reconnaître dans leurs chansons, et je le comprends très bien. Moi j’ai réglé le problème très vite. Après il faut que ça reste poétique, mais pour moi, le fait de parler d’un homme ne rend pas mes textes moins poétiques. Je l’assume complètement, bien que ce ne soit pas une revendication. Je suis queer, pédé, et je veux être fidèle à ce que je suis. Ça fait du bien de voir quelqu’un comme Bilal Hassani par exemple. Il m’impressionne. Il n’est pas du tout cynique dans une époque qui l’est énormément. Et il est courageux. Il n’est pas dans une posture.”


La posture, très peu pour Thibaut, qui a décidé de changer de vie pour se mettre au diapason de ses envies artistiques : “J’étais journaliste politique. J’aimais bien la matière politique, mais je n’aimais pas ce milieu. Et puis mon projet musical commençait à prendre beaucoup de place. Je recevais beaucoup d’encouragements, de mon entourage mais aussi de personnes que je ne connaissais pas qui avaient entendu ma musique et qui l’appréciaient. Du coup, j’ai quitté mon travail et je me suis lancé.” Il a donc remplacé les programmes politiques par des mélodies, comme il le désirait depuis longtemps : “ J’ai toujours fait de la musique. Mon père joue du trombone, du piano et de la guitare. Mon frère est aussi multi-instrumentiste. Ça a toujours fait partie de mon quotidien. Je ne suis pas un grand instrumentiste, mais j’ai fait 10 ans de piano. En revanche, j’ai toujours eu envie de faire de la musique. C’était un désir très fort que j’ai étouffé par peur de l’échec. Donc j’ai tout arrêté. Et quand c’est revenu, ça a été très fort.”

Thibaut Pez a ceci de particulier, c’est qu’il chiade ses mélodies comme peu de personnes le font en France, la production musicale s’étant énormément simplifiée ces dernières années pour une efficacité de production : “ Pour moi, les mélodies sont très importantes. C’est comme ça qu’on retient une chanson. Essayer d’avoir des textes personnels aussi. Mon exigence de sincérité est totale. J’ai besoin d’assumer complètement ce que je fais et d’être fidèle à moi même pour garder un lien avec les gens qui m’écoutent. J’écris et je compose en même temps, et l’exigence mélodique est fondamentale.” Une exigence que l’on retrouve dans la scène française où les filles sont les chefs de file de cette nouvelle pop. Et l’une d’entre elle l’a adoubé en le faisant jouer lors d’une première partie : “ J’ai fait une première partie de Juliette Armanet. Je suis ultra fan depuis le début. Elle me bouleverse. J’ai participé à un concours du site Riffx, je me suis retrouvé dans les finalistes, et apparemment c’est elle qui m’a choisi. Et c’était incroyable. Il y a des gens qui me suivent depuis ce concert. Les gens qu’elle touche l’aiment passionnément.”


On souhaite à Thibaut Pez d’avoir le même succès que Juliette Armanet et de continuer à nous enchanter avec sa pop mi-Demy mi-Daho, mais pleinement personnelle, parsemée d'accès de violence et de romantisme fleur bleue. Nous en tout cas, ça nous plaît. Beaucoup.


SOUS INFLUENCES DIVINES

“Etienne Daho est l’artiste qui m’a le plus influencé pour faire de la musique. Il a été pour moi un catalyseur. “Pop Satori” est un album très important pour moi, notamment la chanson “Quelqu’un qui me ressemble” qui m’a bouleversé. J’y ai vu quelqu’un qui me ressemblait. Ça a débloqué quelque chose, et ça m’a décomplexé par rapport à mes peurs en tant qu’artiste. Il a été un révélateur. Et il ne se cache pas d’être romantique, et je trouve que le romantisme queer est peu développé en France. “The queen is Dead” des Smiths. Cet album a été la BO de mon coming out. La rébellion du Morissey de l’époque, ça m’a électrisé. Et puis son romantisme noir, désespéré… C’est une vraie madeleine pour moi. Et puis l’album “hail to the thief” de Radiohead que j’ai saigné tellement je l’ai écouté. J’avais des posters d’eux partout, mes classeurs de physique et de math étaient recouverts de la tête de Thom Yorke. Quand j’aime quelqu’un, j’aime passionnément. Je suis très Fan. Et je dois avouer que l’album “Live à Bercy” de Mylène Farmer m’a aussi beaucoup marqué. J’aime son côté glauque. Et puis elle m’a fait lire Baudelaire, Edgar Poe, j’ai découvert “Barry Lyndon” grâce à elle. C’est une artiste qui de chouettes références. Son dernier concert était plutôt chouette. Dans les livres, je citerais “La chambre de Giovanni” de James Baldwin qui m’a beaucoup marqué. C’est un livre magique qui parle très bien de la détestation de soi et de l’incapacité qu’on peut ressentir à assumer ses propres désirs et foirer sa vie. J’aime beaucoup les livres d’Annie Ernaux, notamment “La place”. Comment la question sociale se mêle à l’intime… Je comprend ce qu’elle raconte dans la question du transfuge de classe. J’adore Virginie Despentes aussi. Et enfant, mon auteur culte c’était Boris Vian. Et aussi “les souffrances du jeune Werther” de Goethe. Je l’ai lu à la fac et ça m’a poursuivi. Le romantisme allemand du 19ème, ça me retourne. En cinéma, je citerais “Les chansons d’amour”. Ça a été fondateur pour moi. J’adore Christophe Honoré. J’adore les comédies musicales, et le fait qu’on chante quand la réalité est trop dure. Le film de mon enfance, c’est “Peau d’âne” de Jacques Demy. J’étais fou de ce film et des robes “couleur du temps”. Et “Moulin Rouge”, je trouve ça génial. Je trouve NIcole Kidman sublimissime. “La Notte” d’Antonioni a aussi été important pour moi. Jeanne Moreau est mon idole absolue. Dans “La baie des anges” elle est incroyable. Sa liberté absolue, son côté “unapologetic” me plait beaucoup. J’aime aussi la folie d’Helmut Berger dans “Ludwig”.”

EP "Garçon Formidable", sortie le 13 Septembre

En concert le 7 Novembre à L'International (Paris)

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