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Pop Elton !


La vie d’Elton John valait-elle un film ? Il est toujours troublant de voir des biopics de personnes fameuses alors qu’elles sont (à priori) en bonne santé. En effet, quelle est la part de romantisme sur la véritable histoire de ces popstars plus vraies que nature ? Où commence le storytelling de soi? Le fantasme morbide de laisser une trace plus policée et conforme à sa propre légende est tentant.


Mais “Rocketman” évite cet écueil grâce à un style balisé et astucieux : la comédie musicale. Adieu réalité, bonjour paillettes. En cela, le procédé rend hommage au talent d’Elton John et ses compositions bubblegum, pop et sucrées. Le film s’attarde sur la période la plus prolifique du songwriter, 1970 - 1983 - et avouons le, la plus digeste (Les chansons d’après 1985 étant peu écoutables, du moins pour nous). Car, deuxième écueil évité, le style visuel du film réalisé par Dexter Fletcher épouse la flamboyance queer de son héros et sa créativité débordante (et celle de son styliste). Les numéros façon Broadway pour évoquer l’enfance et les atermoiements créatifs sont parfois poussifs, mais suffisamment jouissifs pour y prendre du plaisir.


Le film n’évite cependant pas la caricature, notamment dans les rôles secondaires. Bryce Dallas Howard en vieille dame ressemble de manière troublante à la chanteuse Adèle, le personnage de John Reid joué par Richard Madden passe un peu vite du gendre idéal au diable sans scrupules. Le procédé scénaristique de la confession de Sir Elton affublé d’un costume de diable comme pour signifier de manière lourdingue et moraliste que l’alcool et la drogue c’est mal, est aussi un peu boursouflé.


Mais tout ceci est rattrapé par l’énergie débordante et sexuée de Taron Egerton. Plus sexy que le modèle original, il permet au film de prendre une tournure énergique et excessive mais réaliste. Très bon showman, il donne corps aux excentricités stylistiques et aux débordements psychologiques sans tomber dans le pathos. La scène où il retourne voir son père quand il est devenu très célèbre en est un exemple parfait. Son duo avec Jamie Bell en Bernie Taupin est également très crédible, et on sent parfaitement l’affection que les deux artistes se portent. L’homosexualité d’Elton John est également traitée comme une donnée naturelle, pour le coup sans atermoiements mais dans le cadre de l’époque (le mariage arrangé avec Renate Blauel, le coming out maternel), sans en faire un enjeu de mal être initial.


Alors bien sûr, un tube ne se pond pas forcément aussi vite après le petit déjeuner (La scène où la chanson “Your song” leur tombe dessus), mais la fantaisie de l’Elton John qu’on aime est là, l’humour aussi, et finalement, la distance nécessaire pour contrer l’hagiographie permet au film de se détacher des biopics surchargés, malgré les balises du genre.


“Rocketman” de Dexter Fletcher. Avec Taron Egerton, Jamie Bell, Richard Madden, Bryce Dallas Howard et Gemma Jones. Sortie le 29 Mai.


Texte : Nicolas Vidal

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