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Il y a en Alexia Gredy tout ce qui nous plaît chez une chanteuse pop : une élégance farouche dans le mot juste, des chansons très exactement pop, une voix de conteuse feutrée et envoûtante et une discrétion qui fait force. Comme chez Vanessa, Charlotte, Françoise. Mais ça, c’est pour planter le décor. Parce qu’en vrai, son album « Hors saison » est le plus beau que nous ayons entendu depuis longtemps. Aucune objectivité là-dedans, et aucun débat possible. On aime sans réserve sa façon rentrée de dire « Mon grand » quand elle parle d’un amoureux, de reprendre un « beau masque » taillé pour elle et la violence des sons qui soulignent une profonde légèreté mélodique et un instinct très pop. Ses chansons nous ont séduit dès le départ (son premier EP « L’habitude » pour lequel nous l’avions rencontré une première fois), mais il a suffit d’un retour discret l’été dernier sur la compilation Molitor pour que nous tombions immédiatement en amour pour la chanson « Un peu plus souvent ». Les statistiques Spotify nous l’ont prouvé, nous avons écouté ce titre plus que de raison en 2021. Et depuis, rien ne nous a déçu. Ni son sublime album aux 10 titres impeccables, ni ses premières prestations scéniques pour les défendre. Cela valait bien une rencontre dans un café japonais, entre limonade tokyoïte et affiches érotiques, pour évoquer avec Alexia Gredy la genèse de ce premier disque, le son puissant des mots et l’idole Françoise Sagan.

Interview et photos : Nicolas Vidal

Il y a dans tes chansons quelque chose de très intime et en même temps une certaine violence dans les musiques. Comme une sorte de confession au milieu du chaos.
Je voulais vraiment qu’il y ait des contrastes sur l’album. Les chansons sont très intimes, mais je voulais aussi laisser de la place à l’auditeur. Ce sont des sentiments qu’on ressent tous et qui sont très intenses parfois, mais en même temps c’est très personnel. Je voulais vraiment qu’il y ait la jonction des deux. D’avoir parfois des moments très épurés avec ma voix un peu fragile, et d’autres plus puissants pour montrer ces envolées de sentiments, que ça puisse parfois sentir un peu le danger.

L’univers musical du disque est un peu différent de celui de ton premier EP, « L'habitude », dont tu avais déjà donné une nouvelle version.
Ça m’a pris du temps. Je me suis beaucoup cherchée musicalement. Avec l’EP, j’avais surtout exploré des rencontres avec des gens que j’aimais, et j’étais allé les chercher pour ça. Pour l’album, j’ai pris le temps de savoir qui j’étais et ce dont j’avais envie, quel son j’avais envie d’avoir. Et je me suis un peu perdue, j’ai vu mes faiblesses, découvert un peu plus ma manière de fonctionner. Mais en même temps, je n’avais pas non plus envie de me cacher derrière un nom un peu connu, donc ça a été toute une étape d’acceptation de ma personnalité. Et à partir de mes influences, j’ai vraiment réfléchi au son et je suis allée chercher des réalisateurs qui se sont mis au service des chansons, sans forcément faire ce qu’ils avaient l’habitude de faire. Ils ont réfléchi à ces chansons avec un son global. J’ai travaillé avec un binôme de réalisateurs, Benjamin Lebeau et Alexis Delong. On a vraiment travaillé tous les 3, en fonction des agendas de chacun, sauf pour la chanson « Un peu plus souvent » que j’ai enregistré pour la compilation Molitor et qu’on a rajouté ensuite sur le disque.

Cela aurait été dommage de ne pas l’enregistrer car c’est une chanson que personnellement j’adore.
Je l’aime beaucoup aussi. J’étais ravie de cette proposition qui m’a permis de la faire, en plus pour un projet estival qui collait bien avec le titre. Et puis on a aussi enregistré pendant le confinement une chanson bonus avec Paul Prié avec qui je fais les arrangements live et un remix de la chanson « Vertigo » que m’a offert Yuksek.

Qu’est ce qui t’a donné envie de travailler avec Benjamin et Alexis ?
J’ai rencontré Benjamin via mon éditrice Caroline Molko. A force de me voir galérer et de ne jamais être contente du résultat, elle m’a redonné confiance et m’a proposé de rencontrer Benjamin. Elle m’a dit qu’il avait l’habitude de travailler avec des gens, et effectivement ça s’est tout de suite hyper bien passé. Et Alexis était dans le coin, il est passé le même jour. Je suis quelqu’un de très timide et c’est difficile pour moi de trouver le bon langage, la bonne manière de communiquer mes envies, et eux l’ont tout de suite compris. Je suis arrivé avec des playlists de titres, et on s’est de suite compris sur la direction à prendre.

Tu attendais peut être qu’on te propose plus des choses au départ.
Oui et je me suis dit qu’il fallait que je reprenne les choses en main et d’accepter de parfois mal en parler, mais au moins de prendre le risque et de me lancer.

Oui surtout qu’au final, il y a ta patte d’autrice/compositrice, même si l’album est varié en terme de productions.
Ça a été précieux de travailler avec eux car ils ont vraiment fait attention à ça en reprenant mes démos, mes claviers sur lesquels on a mis des effets. Ils ont pris les chansons comme elles étaient et ils les ont magnifiées.

Ce que je trouve intéressant dans le son de ton album, c’est la basse qui est très mise en avant, comme sur « Drôle d’idée » où sur « A toute allure ». Et cela contraste avec la douceur de ta voix.
On s’est rendu compte assez tôt que c’était pour moi l’instrument qui fonctionnait avec ma voix. Souvent j’essaie d’avoir une rythmique vocale et la basse y répond. Par exemple, sur « A tout allure », on a essayé des pianos, mais quand je chantais seule avec Jérôme à la basse ça marchait super bien, donc a gardé ça. C’est parti des essais en studio.


 

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Il y a aussi parfois des fausses pistes sur tes chansons. Par exemple, sur ce titre là, on imagine que ça va partir vers quelques chose d’hyper dansant et ce n’est pas le cas au final.
On a un peu cherché cet inconfort, ce contraste. On voulait mettre en valeur les sentiments des chansons et faire ressortir les mots. Ce n’était pas évident mais moi j’en suis hyper contente. Elles peuvent être maladroites par moment, parfois assez limpides, et j’en suis ravie.

Est ce que le confinement a chamboulé le choix des chansons de ton disque ?
Il y a sur l’album des chansons bien antérieures, même antérieures à mon premier EP comme « Vertigo ». « Drôle d’idée » et « Reste » sont les plus récentes. Donc elles ont été crées sur un long laps de temps. J’ai eu le temps d’en écarter, d’en garder. C’est un album qui s’étale sur presque 10 ans finalement.

Est-ce que tu as beaucoup retouché tes textes, notamment les plus anciens ?
J’ai du mal à retoucher les chansons, j’aime bien garder le premier jet, où sinon je ne les écris pas. J’ai un rapport très instinctif à l’écriture que j’ai envie de le conserver. J’ai commencé à écrire des poésies quand j’étais petite, enfin si on peut dire que c’est de la poésie, et je choisissais souvent des mots à cause de leur son. Je faisais beaucoup rigoler mes parents avec ça. Ma première peluche s’appelait Philisophe alors que bien sûr je ne savais pas ce que cela voulait dire. Le goût du son et du mot me plaisent. Donc je n’aime pas trop les changer.

Est-ce qu’il y a des gens qui t’ont influencé dans l’écriture ?
Quand j’ai commencé à lire Françoise Sagan, assez tard finalement, c’est elle qui m’a donné goût à la dissection des sentiments, comment raconter des histoires d’amour. Quand tu commences à évoquer ça en chanson, tu as toujours l’impression que ça va être gnangnan, alors que quand tu la lis, sa façon de parler de ça est extraordinaire. Il n’y a rien de gênant. Elle se cache ou elle se révèle et ça m’a donné le goût d’explorer ces différentes caractéristiques dans l’écriture. Sinon plus récemment j’ai lu Maria Pourché qui est une auteur incroyable. On retrouve dans son écriture une brutalité des sentiments, une espèce de fulgurance. La lecture c’est important, ça donne envie d’écrire. Il y a aussi Paul Eluard que j’adore.

Quand tu lis Françoise Sagan, on sent une sorte de facilité, comme s’il n’y avait aucun effort. C’est très limpide. Est-ce que tu aimerais passer à une écriture plus romanesque, plus longue ?
J’essaie parfois, mais je crois que je suis très à l’aise avec le format chanson. Il me permet de ne pas en dire trop et de laisser de la place à l’autre.

Est ce que la musique est une chose importante dans ta vie quotidienne ? Est-ce que tu écoute beaucoup de chansons ?
Complètement. J’ai parfois besoin de ne pas en écouter pour me nettoyer les oreilles, mais c’est hyper important. J’adore découvrir de nouveaux artistes. Je n’ai pas grandi avec beaucoup de musique, du coup j’ai toute une culture musicale à me faire. Il y a plein de choses que tout le monde connaît et moi non. Et en même temps il y a plein d’artistes à découvrir de partout. Tout est à notre portée avec un téléphone, ce qui peut être parfois frustrant car tu te rends compte de la multitude d’artistes que tu ne connais pas. C’est infini.

Ton disque est assez dansant, est ce que c’est quelque chose d’important pour toi ?
La rythmique c’est important et ça donne envie de danser même si les chansons ne sont pas super gaies. « Un peu plus souvent », ça chaloupe un peu même si ce que je raconte est triste. J’aime bien ce contraste. « Beau Masque » aussi est dans cette veine là.

Est-ce que tu penses déjà à la suite ? Tu écris de nouvelles chansons ?
Oui j’ai réussi à en écrire deux nouvelles alors que je n’y arrivais plus depuis la fin de l’album. Je ne vais pas prendre ma retraite si vite finalement. Mais en faisant des concerts et avec le retour des gens sur mon album, c’est revenu. Par exemple, en ce moment je fais des premières parties face à un public qui ne me connaît pas, et c’est très intéressant car les compliments où les non compliments sont plus spontanés vu que ce n’est pas un public acquis. Et j’aime bien ça.

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